"L'aboutissement de l'art c'est la figure" Cézanne
C'est une grande rétrospective des portraits et autoportraits réalisés par Cézanne, qui s'achèvera dimanche, au Musée d'Orsay. L'autre seule exposition exclusivement consacrée à ses portraits avait eu lieu en 1910 à la galerie parisienne de Vollard.
Lorsque l'on pense à Cézanne on visualise des pommes, des paysages verdoyants, des ciels bleus et, inévitablement, la célèbre "Montagne Sainte Victoire" qu'il a représenté près de 80 fois. Des portraits, nous en connaissons tous quelques-uns, surtout ceux de la collection permanente d'Orsay : celui agressif d'Achille Emperaire, son ami, ceux de Gustave Geffroy et "La Femme à la cafetière" (à la vue de ces deux tableaux, Geoffroy, critique d'art, avait présagé l'importance qu'aurait Cézanne dans l'histoire de l'art du XIXe siècle), quelques autoportraits, mais je n'avais jamais entrevu la place importante que tenaient les portraits dans l'œuvre de Cézanne.
Dans leur presque totalité, les soixante tableaux que présente le Musée d'Orsay proviennent de musées étrangers ou de collections particulières, c'est donc une belle découverte.
Cézanne a peint près de 200 portraits, dont 26 autoportraits. Alors que le portrait repose, à l'époque, sur la notion traditionnelle de la ressemblance ou de la personnalité, Cézanne envisage la toile dans son ensemble, figure et décor s'entremêlent au moyen de la couleur : avons nous devant nous un portrait ou une nature morte ?
La matière de ses tableaux est tantôt fluide, tantôt dense et empâtée. Au début des années 1870, Cézanne sculpte le relief du visage avec de larges touches, en fin de décennie il adopte la méthode constructive avec des touches plus fines. Tout au cours de sa vie, et selon son humeur du moment, ses tableaux seront empreints de luminosité ou s'assombriront considérablement.
Cézanne n'est pas un peintre mondain, il peint ceux qui ont la patience de supporter les longues séances de poses : ses amis très proches, les domestiques de la maison, lui-même et bien sûr Hortense Friquet, sa compagne, dont il fait 29 portraits entre 1872 et 1892(sujet qu'il a le plus peint si l'on excepte la montagne Sainte Victoire !). Il déteste être observé lorsqu'il travaille derrière son chevalet, ce qui est difficilement compatible avec la présence d'un modèle, modèle qui ne doit ni bouger ni parler, au risque d'agacer le peintre au caractère quelques peu irascible : "Il faut vous tenir comme une pomme. Est-ce que cela remue une pomme ?" (propos rapportés par Vollard). Dans un accès de colère, bien avant Fontana, il lacéra un portrait .
Lorsque le couple agité que forment Cézanne et Hortense, avant et après leur mariage en 1886 (il l'a rencontrée en 1869) n'est pas en phase de séparation, Hortense est toujours disponible pour poser. Il n'en fait pas un modèle de beauté et, s'il apparaît moins destructeur que Picasso envers ses femmes, on peut percevoir ses sentiments dans la représentation d'Hortense, principalement dans le quotidien en tenue d'intérieur. Cézanne exécute des séries : "Madame Cézanne en robe bleue", "Madame Cézanne en robe rouge".
Auparavant, en 1866-1867, il avait réalisé une longue série de portraits de son oncle Dominique, en larges touches et sans accorder la priorité à la ressemblance, le visage est déformé, sculpté plutôt que peint. C'est "une peinture de maçon" dira son ami et poète Valabrègue.
Dans les dernières années de sa vie, après sa série sur les "Paysans", l'ultime série s'attachera au "Jardinier Vallier", l'aquarelle et le portrait sur fond noir de 1906 étant considérées comme ses dernières œuvres.
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Autoportraits
en haut
à gauche 1862-1864 à droite 1866
en bas
à gauche 1875 à 1878-1880
Autoportraits
en haut
à gauche 1879-1880 à droite 1882
en bas
à gauche 1886 à droite 1898-1906
Portraits de l'oncle Dominique - 1866-1867
Portraits d'Hortense
en haut
gauche Madame Cézanne en jupe rayée 1877
à droite Madame Cézanne en robe rayée 1883-1885
au centre
à gauche Madame Cézanne 1886-1887
à droite Madame Cézanne 1886-1887
en bas
à gauche Madame Cézanne 1886-1887
à droite Madame Cézanne au fauteuil jaune 1888-1889
Achille Emperaire
Portraits - 1867-1870
Portraits de paysans
en haut
à gauche Joueur de cartes - étude 1890-1892
à droite Homme à la pipe - 1891-1896
en bas
à gauche Jeune fille à la poupée - 1895
à droite Paysan assis - 1900-1904
La femme à la cafetière - vers 1895
et Gustave Geffroy - 1895-1896
Le Jardinier Vallier - 1905-1906
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