Un ciel de printemps à Paris en ce mois de février. Dans le jardin de la Fondation Cartier, les arbres s'affrontent, certains s'obstinant à conserver leurs feuilles calcinées, d'autres laissant déjà éclater leurs premières fleurs roses
Photos. M.P. Cliquez pour les agrandir
L'exposition "Géométries Sud, du Mexique à la Terre de Feu" qui se tient dans la Fondation m'a "emballée". Je regrette toutefois de ne pas y être allée plus tôt (visite du 20 février) pour pouvoir vous inciter à vous y rendre, elle se termine malheureusement dimanche 24 février.
L'intérêt de cette exposition est le dialogue qui s'est noué entre l'art géométrique de l'Amérique latine, amérindien ou précolombien, et la génération d'artistes du XXe ou XXIe siècle. Un va-et-vient entre l'art abstrait des artistes européens et l'art populaire de l'Amérique du sud qui fascine encore une jeune génération d'artistes.
Au rez-de-chaussée de la Fondation on pénètre dans le monde de l'architecte Freddy MAMANI, né en 1971, dont les bâtiments reprennent le vocabulaire géométrique des cultures précolombiennes et amérindiennes, les couleurs étant inspirées par les textiles andins.
Dans l'autre salle, le mur de briques de Solano BENITEZ et Gloria CABRAL me fait penser à mes jeux de châteaux de cartes d'enfant solitaire. Les triangles s'élèvent les uns au-dessus des autres avec un rythme cassé comme pour préserver l'équilibre.
Aux côtés de cette oeuvre monumentale, la fragilité de celles de Gertrud GEGO. Née en Allemagne, elle a fui l'Allemagne nazie pour se réfugier au Venezuela. Ses sculptures constituées de fils d'acier et d'aluminium s'appuient sur un répertoire géométrique, tout en donnant un aspect d'irrégularité.
La scénographie du sous-sol s'articule autour des œuvres de Carmen HERRERA, grandes toiles carrées peintes à l'acrylique, représentant des motifs triangulaires aux aplats de couleurs vives. Carmen HERRERA vit aux Etats-Unis, elle a aujourd'hui 103 ans et peint encore quotidiennement.
Et parmi les 250 œuvres présentées, celles qui m'ont interpellée :
Johanna CALLE et sa série "Abstractos de 2017" . Les formes géométriques sont faites avec des photographies argentiques dont la surface est grattée.
La brésilienne Lygia CLARK et sa sculpture en plaques métalliques jointes par des charnières qui permettent différentes compositions (comment ne pas penser à mon père chaudronnier et dinandier)
La construction en tiges entrelacées de Léon FERRARI, Argentin
L'agencement de dominos de José PATRICIO, Brésilien. Les dominos sont associés selon une logique mathématique.
Lolo SOLDEVILLA étudie la sculpture auprès de Zadkine et la peinture à l'Académie de la Grande Chaumière à Paris. De retour à La Havane elle participe à la formation d'artistes cubains et travaille au développement d'un art abstrait révolutionnaire.
José VERA MATOS est né en 1981 et vit à Lima. Dans l'oeuvre présentée il reproduit des extraits d'une importante revue issue du courant politique et culturel de l'indigénisme péruvien. Les formes géométriques simples évoquent l'architecture monumentale Inca. Un travail de minutie et de patience extraordinaire.
Une série de photos de facades colorées du Brésil d'Anna MARIANI
Les arbres de Marcos ORTIZ qui a grandit au Paraguay. Ouvrier agricole, il aborde le dessin tardivement et représente son environnement, les arbres, les collines, les forêts, au crayon puis au stylo. Les lignes quadrillées deviennent un paysage de motifs géométriques.
Parmi les œuvres contemporaines exposées, des stèles en tuf volcanique datant de 3000 à 2000 avant JC. et des terres cuites colorées datant de 100-600 et 200 av. JC-600 apr. JC
Et puis, pour terminer, mes deux coups de cœur :
Les fabuleuses poteries de Gustavo PEREZ, Mexicain, né en 1950. Il délaisse les études d'ingénierie, de mathématiques et de philosophie pour se consacrer à la céramique. Les motifs géométriques qu'il trace à l'aide de lames métalliques et d'outils de sa conception sont d'une grande finesse.
Et la grande installation de la colombienne Olga de AMARAL, "Brumas 2013" constituée de tissages aériens faisant apparaître des motifs géométriques.
Et bien d'autres œuvres intéressantes : vannerie, textile, dessins, peintures corporelles.... Une exposition sur la géométrie dont, très bizarrement, le monde coloré et magique menait à la rêverie.