Depuis le 12 mars se tient, au Musée du Luxembourg à Paris, une exposition pour le bicentenaire de la mort de l'impératrice Joséphine. J'envisageais de m'y rendre mais le jour choisi, un beau soleil incitait plutôt à une promenade dans la campagne, ou dans un parc. Au fond, le souvenir de Joséphine étant intimement liée à la Malmaison, pourquoi ne pas la retrouver dans son château ?
Le château de la Malmaison est situé sur la commune de Rueil, sur la rive gauche de la Seine, tout près de Paris. C'est une belle demeure, à deux étages, édifiée au XVIIe siècle, là où se trouvait une grange, la Mala Domus (mauvaise maison).
Joséphine (Marie-Josèphe Rose Tascher de la Pagerie) naît le 23 Juin 1763 aux Trois-Ilets à la Martinique. Ses parents possèdent un immense domaine et une sucrerie. Marie-Josèphe aura deux soeurs cadettes : Désirée et Marie Françoise. Ses études chez les Dames de la Providence à Fort-Royal sont interrompues à la mort de Désirée.
Un mariage "arrangé" avec Alexandre de Beauharnais, fils de l'ancien Gouverneur Général des Isles d'Amérique, la contraint à quitter son île : le mariage à lieu en 1779 à Noisy-le-Grand, elle a 16 ans. Alexandre, capitaine au régiment de Sarre-infanterie se révèle vite exigeant et emporté, Marie-Josèphe, elle, trop frivole. Deux enfants naissent : Eugène et Hortense. Une liaison d'Alexandre avec Mme de Longpré de la Touche entraîne la séparation du couple. Marie-Josèphe, trop jeune pour être indépendante, demeure quelques temps chez ses beaux-parents, puis part retrouver sa famille en Martinique.
Quand elle revient à Paris, en 1790, Alexandre, toujours son époux, a embrassé une carrière politique : il succède à Mirabeau à la présidence des Jacobins. Durant "la Terreur", Alexandre, puis Marie-Josèphe sont incarcérés à la prison des Carmes. Alexandre est guillotiné le 23 Juillet 1794, précèdant Robespierre de cinq jours. Marie-Josèphe échappera de justesse à l'échafaud.
A sa sortie de prison, elle se tourne pour survivre vers les gens en place, Mme Tallien, Barras (Membre du Directoire). Un peu plus tard, elle loue un hôtel rue de la Victoire qu'elle arrange à son image et à son goût, elle y reçoit le jeune et talentueux Napoléon Bonaparte. Tombé immédiatement sous son charme, fou d'amour, Napoléon précipite le mariage. Il a lieu le 9 mars 1796. C'est Napoléon qui lui donne le surnom de Joséphine.
En 1799, Napoléon achète à Joséphine le château de La Malmaison. Devenue très vite épouse du Premier Consul, et plus tard de l'Empereur des français, elle aura toujours plaisir à aller s'y ressourcer loin des contraintes de la cour. Joséphine, naturelle, toujours et partout à l'aise, élégante et raffinée, au goût sûr, est admirée et aimée de tous. Pour ses invités elle ressuscite la douceur de vivre, alternance de liberté et de plaisir partagés : promenades, lectures, jeux, théâtre... L'austère Napoléon lui-même participe, elle fait son bonheur, il le dira plus tard à Saint Hélène : "c'est la femme que j'ai le plus aimée .... elle était l'art et les grâces".
Pourtant, Joséphine ne pouvant donner un héritier à Bonaparte, le mariage est dissous pour raison d'état en 1809. Richement dotée, elle conserve son titre "d'impératrice douairière", la Malmaison, le Palais de l'Elysée à Paris et le château de Navarre près d'Evreux.
Elle se retire définitivement à la Malmaison en 1811 où elle continue à recevoir des hôtes de marque.
Au fil des années, Joséphine a agrandi, embelli, raffiné La Malmaison. Les architectes se sont succédés : Percier et Fontaine clôturent le parc, construisent des écuries, Morel bâtit une grande serre chauffée, un chalet et trois maisons au bord de l'étang de Saint-Cucufa pour abriter un couple de vachers venus de Suisse, une vacherie, une laiterie...Pour le troupeau de mérinos (il comptera plus de 2000 têtes en 1812), Thibaut et Vignon installent une bergerie. Berthault, lui, retrace un parc paysagé avec une rivière, un petit lac et il achève la grande serre de 50 mètres. Car la botanique passionne Joséphine : à La Malmaison 200 plantes fleuriront pour la première fois en France (magnolia pourpre, hibiscus, camélia, dahlia), 250 espèces de roses seront plantées en buisson dans le parc, ou dans des pots que l'on sort des serres en juin.
Joséphine s'intéresse aussi à la zoologie : elle tente d'acclimater dans le parc, autruches, émeus, kangourous, zèbres, singes, gazelles. Leur entretien se révèle très vite onéreux et impose un important personnel. Dès 1805, certains animaux sont donnés au Muséum et Joséphine se consacrera essentiellement à sa chère botanique.
A l'énoncé d'un parc aussi extraordinaire on comprend l'étonnement et le plaisir des visiteurs.
A l'intérieur du château, peintures, sculptures, objets d'arts, vases antiques abondent. Pour tous ces travaux, ces aménagements, ces décorations, pour sa toilette et ses bijoux, Joséphine a dépensé sans compter (c'est là son énorme défaut). Elle aura toujours recours à Napoléon pour éponger ses dettes.
Le 14 mai 1814, elle accompagne le tsar Alexandre 1er chez Hortense à Saint Leu. Elle prend froid en visitant le domaine qui jouxte la forêt de Montmorency. Elle meurt le 29 mai. Les plantes, faute d'entretien, ne lui survivront pas. Le domaine sera morcelé.
Joséphine reposera onze ans dans la cave du presbytère de Rueil. En 1825 Eugène et Hortense lui feront élever, dans le choeur de l'église Saint-Pierre Saint-Paul de Rueil, un monument en marbre de Carrare. Josephine y est représentée en prière, telle que l'a peinte David dans sa grande toile du Sacre de Napoléon. Plus tard, Napoléon III fera élever pour sa mère Hortense, un mausolée dans le même choeur, seront ainsi réunies mère et fille.
Aujourd'hui le parc est réduit à six hectares (il en comptait 800). La perspective paysagère a été conservée, la grotte et le bassin surmonté de la statue de Neptune sont toujours là, quelques arbres remarquables subsistent, tel le cèdre de Marenzo. Certaines plantes que Joséphine a connues ont été réintroduites. Cela ne nous donne qu'une petite idée du parc sur lequel Joséphine régnait, mais son charme n'a pas totalement disparu.
Au rez-de chaussée du château les salons se succèdent : dans celui de musique le piano d'Hortense est encore là (la harpe de Josèphine a été prêtée au Musée du Luxembourg). Dans la salle à manger de style pompéien des danseuses aux teintes raffinées animent les murs. La salle du Conseil simule, en coutil rayé, une tente militaire. J'aimerais m'asseoir dans la bibliothèque, prendre un livre, faire tourner le magnifique globe céleste.
Les appartements sont à l'étage. Joséphine y avait deux chambres, l'une fastueuse, rouge et or, l'autre, plus modeste, était sa préférée. Toutes les pièces nous donnent à voir des objets et des peintures remarquables.
La Malmaison est, à vrai dire, plus une demeure aux dimensions humaines, qu'un château comme on l'entend habituellement. J'y poserais volontiers mes valises pour m'y ressourcer, un temps, moi aussi.
La salle à manger
la bibliothèque
Dans toutes les pièces de superbes pendules
Dans la salle du Conseil. Portrait de Joséphine par GERARD - 1801 - réplique autographe de l'original (aujourd'hui au Musée de l'Ermitage à Saint-Petersbourg) qui se trouvait à cet emplacement sous l'empire
Huile sur toile - Joséphine par Henri François RIESENER 1806
Huile sur toile - François Baron GERARD - vers 1802 - Napoléon en costume de Sacre
Huile sur Toile - Joséphine par GROS - 1809
Jacques Louis DAVID - huile sur toile - Le premier Consul franchissant les Alpes au Col du Grand St Bernard - 1800/1801 - Commandé par Charles IV pour le Palais royal de Madrid. David exécuta quatre répétitions avec des variantes de ce tableau. Les trois autres se trouvent à Versailles à Berlin et à Vienne.
Chambre de Napoléon
Chambres de Joséphine
Huile sur toile - Portrait inachevé de Josephine - avant 1805 - Pierre-Paul PRUD'HON
Eglise Saint-Pierre Saint-Paul de RUEIL
Mausolée en marbre de Carrare - Joséphine est représentée grandeur nature
Photos - Michèle PELLEVILLAIN
Musée National du château de La Malmaison - 92500 RUEIL MALMAISON
Ouvert tous les jours sauf le mardi
Pour l'anecdote, ci-dessous la bague de fiancailles - diamant et saphir disposés en "toi et moi" - offerte par Napoléon à Joséphine en 1796. Cette bague (18mm de diamètre) a été vendue au enchère le 24 mars 2013 pour 896.400 euros (elle était estimée entre 8.000 et 12.000 euros !)
photo internet