Jacques Callot est l'un des grands maîtres de la gravure à l'eau-forte. Il a traité les sujets historiques, les sujets religieux, et aussi les fêtes, les foires, les personnages pittoresques (les gueux, les balli, les Gobbi - en italien bossus). Parmi ses gravures, les plus connues sont sans doute les "Misères de la guerre", oeuvre étonnante par ses petites dimensions qui n'empêchent en rien la complexité de l'image représentée avec ses paysages, ses foules, ses batailles. Callot fouille chaque personnage, chaque détail si minuscule soit-il. C'est un prodigieux exercice de graveur.
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Jacques Callot est né à Nancy au cours de l'hiver 1591-1592, dans une Lorraine qui occupe une position médiane sur l'axe joignant l'Adriatique à la mer du Nord. Au XVIe et XVIIe siècle, cette voie est sillonnée par des courriers, des soldats, des marchands, des pélerins, beaucoup sont italiens. Callot est très vite attiré par les arts, il s'initie très jeune au dessin, peut être déjà à la gravure. Tous les étrangers qu'il voit passer ne peuvent que l'inciter à voyager.
A douze ans il s'enfuit pour Rome en compagnie de bohémiens. Reconnu en cours de route par des marchands, amis de sa famille, il est ramené à la maison maternelle. L'année suivante, seconde fugue jusqu'à Turin. C'est son frère Jean qui met fin à l'équipée.
1608, son père consent à le laisser partir à Rome suivre les cours du graveur champenois, Philippe Thomassin.
1611, Callot s'installe à Florence où l'attire la protection de Cosme II de Médicis. Il y réside dix ans. Après la mort de Cosme II, en 1621, il rentre à Nancy. Son père, âgé de soixante ans, y vit encore, il est toujours roi d'armes. Son frère ainé est devenu secrétaire du duc Henri II. Jacques Callot épouse, deux ans plus tard, Catherine Kuttinger, fille d'un échevin. La famille Kuttinger, comme celle de Callot, a été anoblie. A ce titre elle possède une fortune qui assure aux époux une belle aisance. Callot voyage : il se rend aux Pays Bas où il rencontre Van Dyck, puis à Paris où il fait plusieurs séjours entre 1628 et 1631.
1627 il est aux Pays Bas, à Breda, pour en graver le Siège (la préparation des Sièges lui aura donné l'occasion de méditer sur l'art militaire, sur la guerre et ses malheurs. On trouve déjà des scènes des "Misères de la guerre" dans le "Siège de Breda")
1628, sur l'ordre de Louis XIII il part à la Rochelle réaliser les dessins qui aboutiront aux planches consacrées aux Sièges de la Rochelle et de l'Ile de Ré.
Pendant ce temps, en Lorraine, la peste décime la population. Une épidémie particulièrement cruelle s'abat sur Nancy en 1630. Sans doute victime de la contagion, le père de Callot meurt.
1633 Louis XIII, irrité par Charles IV qui a pris le parti des "Impériaux", investit Nancy avec ses armées. Louis XIII demande à Callot "de représenter cette nouvelle conqueste" mais Callot "pria S.M. avec beaucoup de respect, de vouloir l'en dispenser, parce qu'il estoit Lorrain et qu'il croyait ne devoir rien faire contre l'honneur de son Prince et contre son païs"
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Les gravures de Callot "Grandes et petites misères de la guerre", où il décrit pillages, viols, ravages d'églises et de couvents ne sont pas pris sur le vif. Callot n'a pas vu tous ces méfaits, les malheurs de la Lorraine sont postérieurs à ces planches, mais il les a composées au moment où son pays entrait dans la plus triste période de son histoire, et alors qu'il avait sous les yeux l'image de la détresse car la guerre de Trente Ans déchirait l'Europe depuis 1618.
En 1635, peu après l'édition des "Misères de la guerre", Callot meurt. Il avait gravé plus de douze cents cuivres.
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Jacques Callot est avant tout un dessinateur (il a exécuté plus de deux mille dessins au cours de sa vie). Il commence par manier le burin, instrument précis qui ne laisse rien au hasard, puis il approche l'eau forte et sera le créateur d'un procédé original aussi important pour la gravure que l'a été l'apport de Jan Van Eyck pour la peinture.
Son idée géniale est d'avoir substitué au vernis mou et fragile usité jusqu'alors, le vernis dur des luthiers florentins qui permet au graveur de poser sans inconvénient sa main sur le vernis pour travailler. Un autre avantage, le vernis n'est pas repoussé en bourrelets de part et d'autre de la taille par la pointe, le graveur peut alors rapprocher autant qu'il le désire les traits les uns des autres et d'en tracer de très fins.
Callot va également utiliser deux sortes d'échoppes :
- La pointe échoppe qui tenue comme une plume est utilisée pour le travail minutieux en trait court.
- L'échoppe couchée qui emmanchée comme un burin et tenue presque horizontalement et parallèlement à la plaque permet de longs sillons.
Callot peut désormais traduire les fantaisies du dessin et réaliser dans le détail ses multiples petits personnages.
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Portrait de Jacques Callot par Ignazio Enrico Hugford,
d'après une peinture d' Antoon van Dyck (détail)
Le Siège de Breda (composé de 6 planches juxtaposées pour une dimension totale de 120x140cm)
détail milieu planche du bas
Le Siège de la Rochelle
Egalement 6 planches de chacune 564x449 cm
Détails planche bas milieu
Le Siège de la citadelle de Saint Martin de Ré
(également 6 planches dont les dimensions sont sans doute comparables aux autres "Sièges")
Détail, planche du bas milieu
LES GRANDES MISERES DE LA GUERRE
18 planches, dont le frontispice, de format 18,6 cmx6,4cm - édités en 1633 (au bas de chaque planche sont gravés six vers en vieux français disposés deux par deux. Leur auteur est l'abbé de Marolles. L'écriture étant petite, Ils sont extrêmement difficiles à lire - vous trouverez un exemple sous la planche "l'hopital")
L'enrolement des troupes
La bataille
La maraude
Le pillage
Dévastation d'un Monastère
Pillage et incendie d'un village
Vol sur les grandes routes
Découverte des malfaiteurs
L'estrapade
La pendaison
L'arquebusade
Le bûcher
La roue
L'hopital
Voyez que c'est du monde et combien de hazars Persécutent sans fin les enfants du Dieu Mars
Les uns estropiez se trainent sur la terre Les autres plus heureux s'esleurent à la guerre
Les uns sur un gibet meurent d'un coup fatal Les autres s'en vont du camp à l'hospital
Les mendiants et les mourants
La revanche des paysans
La distribution des récompenses
LES PETITES MISERES DE LA GUERRE
comportent 7 planches, dont le frontispice, - 11,3cmx 5,5cm édités en 1635
Le campement
L'attaque sur la route
Devastation d'un monastère
Pillage et incendie d'un village
La revanche des paysans
L'hopital
ENORME COUP DE COEUR pour un détail du Siège de la Rochelle et quel bonheur ce serait de contempler de près les originaux de ces planches !!
VOIR AUSSI l'article sur les "GOBBI" de J. CALLOT cliquez : Les "Gobbi" de Jacques CALLOT