Cette exposition "L'alchimie du livre" de l'artiste allemand Anselm Kiefer se terminait le 7 février. J'ai fait cette visite le dernier jour, je ne peux donc pas vous inciter à vous y rendre. Par contre se tient en ce moment au Centre Pompidou et jusqu'au 18 avril 2016 une exposition consacrée à une rétrospective de son œuvre de la fin des années 1960 à nos jours. Je ne vais pas manquer de m'y rendre très vite, l'exposition de la Bibliothèque Nationale François Mitterrand m'ayant particulièrement passionnée.
Anselm Kiefer est né dans le Bade-Wurtemberg en mars 1945 (deux mois avant la reddition des armées allemandes) dans un milieu familial petit-bourgeois. Il commence des études de droit et suit parallèlement les cours des Beaux-Arts de Fribourg, puis de Karlsruhe.
En 1969, il se fait connaître en se photographiant, dans des villes autrefois occupées par l'armée allemande, le bras levé selon le salut nazi : son but est de réveiller les consciences mais aussi de s'interroger sur sa situation de peintre dans l'Allemagne après l'Holocauste.
Les œuvres de Kiefer sont décriées mais lui permettent de se faire connaître.
En 1970, son art prend progressivement la forme d'une quête spirituelle portée par les mythes, la religion, les cosmogonies, la kabbale, mais aussi des femmes au destin tragique.
A partir des années 1980, il participe aux grandes expositions d'art contemporain et représente l'Allemagne à la Biennale de Venise.
En 1993, il quitte l'Allemagne pour la France. Il s'installe à Barjac, dans le Gard, dans une ancienne filature désaffectée puis achète l'ancien entrepôt de 40.000 mètres carrés de la Samaritaine dans l'est parisien, selon l'artiste "à peine suffisant pour tout caser".
En 2007, il inaugure "Monumenta" au Grand Palais de Paris. Il offre son domaine de Barjac à l'Etat pour en faire une fondation franco-allemande. Il reçoit la commande d'une œuvre pour l'aile Sully du Louvre.
L'exposition de la BNF est consacrée aux livres de Kiefer créés entre 1968 et 2015. De grandes dimensions, exemplaires uniques, réalisés dans des matériaux divers, ces livres sont le fondement de son oeuvre. Je vous propose de regarder quelques pages comme ont pu le faire les visiteurs.
"Shevirat h-kelim" - "le bris des vases" 2015 - installation métal, livres de plomb et bris de verre.
Le poids de ces livres interdit toute manipulation et renvoie à la mystique judaïque du Livre et à sa fonction mémorielle. Le titre fait allusion au mythe de la Création divine selon l'école kabbalistique de Safed au XVIe siècle. Les thèmes juifs se trouvent peu à peu dans l'œuvre de Kiefer surtout après son voyage en Israël en 1984.
"La lettre perdue"
Ancienne presse typographique envahie par des tournesols. Cette sculpture rappelle l'invention de Gutenberg . Le livre est source du savoir et symbole culturel. Le tournesol représente l'élan spirituel porté par le livre.
"Der Rhein" 1982-2013
Ce livre composé de plusieurs impressions xylographiques présente une vue des berges du Rhin, symbole de l'identité allemande, mais paysage pollué par des édifices d'un style architectural nazi et des bunkers.
La figuration du polyèdre de la "Mélancolie" de Dürer renforce la germanité de l'œuvre.
"Nigredo" ou l'œuvre noire - Titre faisant référence à la première étape des opérations alchimiques. Cette sculpture montre la proximité du processus artistique de Kiefer avec l'alchimie par l'introduction de toutes sortes de matériaux dans son œuvre.
Grand livre en plomb (je n'ai pas noté le titre exact et remercie par avance le lecteur qui pourra me fournir les informations)
Mon coup de cœur final :
"Le livre" Grande marine, huile, émulsion, acrylique, shellac (gomme-laque), livre en plomb sur toile
Sacralisation du livre : l'idée du livre comme symbole de savoir immuable et d'élévation spirituelle et en même temps lourdeur du plomb qui rappelle tragiquement l'impossible envol de la culture et de l'art vers l'idéal.
Photos MP.