Le Petit Palais consacre une rétrospective à Anders Zorn, grand maître de la peinture suédoise de la fin du XIXe et du début du XXe. Cent cinquante œuvres présentées dans une très belle mise en scène, dont l'une, la "Danse de Saint Jean", est devenue, telle notre "Joconde", une icône en Suède.
Anders Zorn a un talent exceptionnel pour l'aquarelle sur très grand format, travaillant en glacis légers ou faisant disparaître totalement le blanc du papier sous des épaisseurs plus couvrantes. Zorn également magistral pour la peinture, allie à son talent la rapidité : il réalisera en moins de onze jours le portrait d'Elisabeth Cameron. Graveur de génie et libre dans la perfection, c'est évidemment là qu'il me touche le plus. Il grave à l'eau-forte en griffant le vernis de longs traits puissants : c'est superbe. 288 estampes tirées en peu d'exemplaires seront répertoriées par Karl Asplund dans un catalogue de 1920, dont 212 figurent dans le fond de la BN France.
La perfection pour parler d'Anders Zorn est le mot juste : impressionnisme et réalisme se mêlent dans les scènes de genres, de folklore, les paysages, l'eau. Il portraitise à la fois les rois, les célébrités, les actrices et les gens du peuple.
A la fin de sa vie Zorn multiplie les dessins et estampes de nu, utilise aussi la photographie. Il donne moins d'importance au lieu et à l'atmosphère, s'attachant à la représentation de la chair.
J'ai assez vite pensé à Sorolla en voyant les œuvres de Zorn (voir http://voir-ou-revoir.com/search/sorolla/ ). Ils étaient amis et rivaux, tous deux présents à l'Exposition Universelle de 1900, Zorn avec la "Danse de Saint-Jean", Sorolla avec "Triste héritage" pour lequel il obtint le Grand prix.
Tous deux de famille modeste, Sorolla est orphelin élevé par sa tante, Zorn né d'une brève liaison et élevé par sa mère et sa grand'mère. Tous deux surdoués en dessin ont le même parcours talentueux qui leur fera trouver la gloire et la fortune. Ils ont en commun la recherche de la lumière prédominante dans les scènes de genre, et une fascination pour le blanc immaculé du linge. Sorolla voyage, Zorn aussi, beaucoup : l'Espagne, la France, l'Angleterre, la Turquie, l'Italie, la Grèce, l'Afrique du Nord, les Etats-Unis où il reçoit un accueil triomphal.
Sorolla et Zorn : un même genre de peinture, mais l'un est du pays de Manuel de Falla, l'autre de Franz Berwald. L'exposition de Sorolla m'avait fait vibrer, celle de Zorn m'impressionne. Son grand autoportrait en rouge nous accueille froidement à l'entrée : l'imposant Monsieur Loyal, regard dur, visage fermé, bras ouverts en crabe, repoussant en nous le désir de nous jeter dans ses bras, semble nous prévenir : "Entrez et vous allez voir ce que vous allez voir !" . J'ai vu : je quitte cette exposition étourdie par tant de perfection, mot un peu oublié dans notre monde où tout se fait vite et plutôt mal, et, devant son talent magistral de graveur, je ne peux que remettre en question le sens de mon entêtement à vouloir, depuis tant d'années, creuser le métal.
Anders Zorn, né en 1860 à Mora, décède dans sa région natale en 1920.
Exposition au Petit Palais jusqu'au 7 décembre.
Le choix de photos est évidemment suggestif et sélectif, lié aussi aux conditions d'éclairage et à la difficulté de photographier des œuvres sous verre. Je ne vous montre qu'une infime partie de cette grande exposition à ne pas manquer même si l'on est repu d'impressionnisme.
Franz Berwald : https://youtube.com/watch?v=BKhZ30b-cvs
Manuel de Falla : https://www.youtube.com/watch?v=McDd1xWjt78
1915 - Autoportrait en rouge - photo internet
Photos qui suivent MP - cliquez pour les agrandir ou pour les faire défiler
1884 - Jean Burnay - Aquarelle sur papier
1885 - Des châteaux en Espagne - Aquarelle sur papier - Emma Lamm qui épouse Zorn cette année là, pose pour ce portrait.
1886 - Portrait de Viktor Rydberg, écrivain, journaliste, homme politique, personnalité marquante de la Suède de son temps - Aquarelle sur papier grand format
1886 - Vacances d'été - Emma pose pour cette marine peinte dans l'île de Dalarö, station balnéaire à la mode. Aquarelle sur papier grand format
1889 - Dans l'atelier de Wikström - Huile sur toile
1894 - Brodeuses - Huile sur toile - peinte à Venise
1892 - La Dame à la cigarette - Huile sur toile
1891 - Veronica Heiss - Huile sur toile
1888 - Rosita Mauri - Antonin Proust, homme politique demanda à Zorn le portrait de sa maîtresse, célèbre danseuse étoile et professeur à l'Opéra de Paris - Aquarelle et gouache sur papier grand format.
1900 - Portrait d'Elizabeth Cameron - Huile sur toile
1892 - Dans le grenier à foin - Huile sur toile
1906 - Dans le fumoir - Huile sur toile
1889 - Pétrir le pain - Huile sur toile
1897 - Danse de la Saint Jean - Huile sur toile
Mes deux coups de cœur en peinture :
1880 - En deuil - Aquarelle sur papier - Le roi de Suède Oscar II en commanda une réplique, Zorn avait tout juste 20 ans.
1886 - Jeune bédouine - Aquarelle sur papier
1915 - La Prière - Crayon sur papier
1918 - Ols Maria - Sanguine sur papier
SERIE DE GRAVURES A L'EAU-FORTE
1906 - Auguste Rodin - 2ème état.
1894 - Isabella Gardner - 2è état
1899 - Le Président des Etats-Unis Grover Cleveland
1900 - Emma Zorn - 2è état
1895 - La Guitare ou Souvenir - état unique
1891 - Madame Simon - 1ère planche - 1er état
1890 - Zorn et sa femme - 2è état - inspiré d'une eau forte de Rembrandt qui pose au même âge avec Saskia. Zorn collectionne les gravures de Rembrandt.
1890 - Axel Herman Haig, qui l'initia à la gravure
Dernière salle de l'exposition